Lomepal A live COLORS session with melancholic French rapper Lomepal

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WordsMaxime Delcourt

Through its hugely popular YouTube channel, COLORS challenges the traditional music landscape by showcasing the most exciting up-and-coming artists.

In this series we present a special session recorded at the COLORS studio in Berlin, alongside an interview with the featured artist. For this episode, Maxime Delcourt spoke to the French rapper Lomepal about his debut album and his melancholic style.

En juin 2017, Lomepal publiait Flip, un premier album couronné de succès et qui ne ressemble à aucun autre. Sa folie n’appartient qu’à lui, et fait du rappeur parisien l’un des symboles du hip-hop français tel qu’il brille ces dernières années.

L’engouement pour Lomepal en France est tel qu’on se dit que l’on n’a même plus vraiment le choix de le trouver autrement que génial. Depuis la sortie de Flip on l’a vu sur différents plateaux télé, visiblement dépassé par l’ampleur de la situation et tentant de masquer son émotion face à toutes ces salles de concerts archi-combles et euphoriques.

En début d’année, il a également collaboré avec The Alchemist à Paris L.A. Bruxelles et écoulé son disque par dizaines de milliers. Il a été nommé aux Victoires de la Musique et il tourne aujourd’hui le clip de Paradise (extrait du nouvel album de Lefa) à Los Angeles.

C’est là, au cœur de la Cité des Anges, alors qu’il profite d’une semaine de vacances avant de débuter le tournage, que l’on rencontre le rappeur parisien. Il est visiblement ravi de l’accueil réservé à son univers par le public francophone. "Le fait d’être dans la musique depuis un moment m’aide à gérer cette célébrité," explique-t-il.

"Ma chance, c’est que tout s’est fait progressivement. Les collaborations se sont établies au fur et à mesure des années, les rencontres également et le succès de Flip s’est fait sur la longueur. Et puis il s’agit d’être honnête: je ne suis pas Michael Jackson, je peux encore prendre le métro sans me faire reconnaître."

À l’écoute de Flip, impossible de ne pas reconnaître le style Lomepal: une musique qui semble incapable de se sédentariser, passant de collaborations avec la fine fleur des musiques électroniques françaises (Stwo, Superpoze, The Shoes) à des passages chantés et une écriture faite de métaphores et caractérisée par des idées exprimées simplement, "de façon à ce qu’elles ne puissent pas être détournées," dit-il.

Il y a là une grande sensibilité et une façon très personnelle de laisser s’exprimer son âme cabossée et les vestiges d’une adolescence tourmentée. "Petit, j’avais peur de devenir fou. Ma mère a fini par me rassurer en me disant qu’elle aussi avait cette crainte, mais ça ne m’a pas empêché de voir des psys. Ça n’a jamais marché pour autant. L’écriture me paraît beaucoup plus libératrice. Car, même si je ne pense pas être aussi perturbé aujourd’hui, ces troubles ressortent parfois, ils me donnent de l’inspiration."

Encore moins étonnant de le voir aujourd’hui dépasser le strict cadre du hip-hop. On le sent très proche de toute une scène rap francophone (les belges Caballero et Roméo Elvis, les parisiens 2Fingz et Prince Waly), mais Lomepal est également parvenu à flirter avec la furie électrique du rock.

"C’est encore plus évident en live où je casse plus facilement ma voix," précise-t-il, "mais c’est vrai aussi que j’essaye de poser mes textes sur des mélodies rock, plus émotives et épiques que purement gangsta."

À titre d’exemple, il a notamment repris Someday des Strokes sur le plateau de Monte Le Son il y a quelques mois. "Dans cette émission, on est obligé de faire une reprise. Comme je passe mon temps à chanter ce titre, le choix a été évident."

Pour comprendre cet attrait quasi obsessionnel pour les riffs aiguisés et les refrains à la jouissance immédiate du rock’n’roll, sans doute faut-il évoquer un trait commun à cette nouvelle génération de rappeurs français, ouverts d’esprit et élevés aux algorithmes de YouTube et Spotify. Peut-être faut-il également dire un mot de la culture musicale de Lomepal, biberonné aux vidéos de skate qu’il regarde en permanence.

"Musicalement, ça a forcément dû m’influencer, même inconsciemment," précise-t-il, tout en refusant d’être comparé aux rappeurs américains ayant de près ou de loin adopté l’esthétique de la culture skate: Tyler, The Creator, Lupe Fiasco ou encore Pharrell.

"De tous ces mecs, le seul que je respecte, c’est Lil Wayne," dit-il. "Tout simplement parce qu’il est le seul à être vraiment connecté aux skaters américains. Pareil pour moi: en France, tout le monde sait qui je suis dans le milieu du skate. Toutes les stars de la discipline aujourd’hui, celles qui tournent dans le monde entier, ce sont mes potes depuis longtemps."

Voilà ce qui singularise Lomepal: le petit quelque en chose en plus qui lui permet de balancer ceci dans un de ses morceaux, "jamais un aussi bon rappeur n'avait vraiment fait de skate, jamais un vrai skateur n'avait été aussi fort en rap."

Le tout, sans délaisser une seconde l’underground dans lequel il semble s’être forgé depuis l’adolescence. "Disons que je suis un outsider qui a réussi à faire son trou, en prouvant que l’on n’est pas obligé de faire comme les autres pour réussir," nuance-t-il. Car, comme il tient à l’affirmait en guise de conclusion: il sait qu’il est désormais attendu au tournant, qu’il va devoir confirmer ce style qui a tant plu et qui lui permet d’être comparé à certaines stars de la chanson française.

Avec tout ce que cela représente d’enthousiasme et de crainte. "Bien sûr que j’ai peur de la réception qui sera accordée à mon deuxième album, mais je suis en même temps très fier que le public ait compris que j’essaye de faire de vraies chansons, et pas simplement du rap. Mon rêve, après tout, est d’entendre un jour une de mes chansons dans une soirée karaoké."

Words by Maxime Delcourt

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